Routes à grandir.

 

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Après quelques pages,  tu remontes la couverture.  Tu te retrouves au fond de ton lit en 90, sous le ciel pas mansardé, entre peluches et coussins, coiffé (e) d’un son walkman. Tu viens de te prendre 30 ans dans les yeux .

T’as tout qui pétille sans alcool.

Des miettes de palets des dames, petits cailloux au fond des chaussures, tu chemines devant le troquet du village et récupères le pain de la semaine. La poussière sur tes pieds, des ruelles terreuses, tu rentres dans l’histoire car ton rural à toi, c’est le jardin. Trop grand pour se perdre dans l’espoir d’être découverte. Autour, la forêt. Il y a pas d’autre dehors. La culpabilité ou la paranoïa des contes à journaux t’ont figé (e).

Leur rural à Julie, Rom, Chris, Vlad, canif rougissant à fleur de peau, qui prend toute la place dans les jours d’été, compagnons d’ennui : c’est le Gang !

C’est né ici, dans la Nièvre et ça se shoote à la chlorophylle. Chaque maison sue dans ses pierres le sang des natifs taiseux, les fondations effritées par le départ des gamins pour  des aventures bitume.

Pourtant le Gang, lierre grimpant, s’y accroche à son territoire où résonnent les rires en deux roues. Il s’étale, se blesse. Ensemble, ils sont vivants.

J’ai aimé les accompagner sur mon vélo fantôme. En bord de rivière, le ventre qui tricote l’envie qu’ils me poussent à l’eau. Susciter l’intérêt. Ne pas prendre la place de Julie, icône non statufiée. Juste exister à leurs côtés.

De ce besoin d’appartenance pour éviter l’errance sur les routes à grandir. Celles offertes, mèches courant dans le vent, par le coup de pédale qui libèrent les mômes. Toujours plus loin, toujours plus vite, le Gang évite les ornières.

Mais on ne peut pas toujours échapper aux voies sans issue.

Pas de marche-arrière. Le rétro-pédalage fait mal à l’âme.

Les petits garçons qui se déguisent en homme, oublient parfois de retirer leur costume avant d’aller se coucher.

Pas de masque de super-héros non plus, lorsque la chaîne déraille. C’est la chute !

Se relever couvert de sang et de came, cocktail explosant les rêves d’enfants.

La part noire gangrène le reflet de l’autre et les histoires rangées au fond des cartons à chaussures font des confettis avec le présent.

Restent les serments, l’amour sincère, leur véritable aimant.

Devenue voyeuse lectrice, j’ai sauté par dessus la  barrière d’un des nombreux prés. Les pieds dans les herbes trop hautes, je me suis surprise à tourner les pages plus vite, boulimique de cette adolescence fantasmée, malmenée par les éléments. De ces rouages sans frein.

Je suis devenue voyageuse  en Rural Noir, monde parallèle où les mues ne s’abandonnent pas au temps, où les choix ne se cachent plus dans les placards.

Rural Noir

Benoît Minville

Editions Gallimard Série Noire

Playlist : Depeche Mode : Behind The wheel

 


4 réflexions sur “Routes à grandir.

  1. Routes à grandir, routes à partir
    Routes à emprunter ou à rendre
    Routes à suivre, routes à fuir
    Routes à quitter ou à reprendre

    Et peu importe où ça nous mène…

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  2. Une escapade qui résonne, un air d’adolescence … et les images surgissent… un film: « stand by me », encore une forêt: celle des cabanes et des premières fois, un deux roues sur une route… de campagne et des histoires de potes avec un air de « wind of change ». Bon je reviens, il me semble que les routes que tu évoques sont plus incertaines…La Nièvre, je connais d’ailleurs, j’y vais bientôt, alors serait ce les prémices d’une lecture de voyage?

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